LÉAH MADDIX, LA CONTEUSE 141 conte. De nos jours, on a tendance à penser que des scènes de violence n’ont pas leur place dans les contes pour enfants. C'est pourquoi le Petit Chaperon rouge de la télévision ou des livres d’histoires modernes échappe aux dents affilées du loup, contraire- ment à la version traditionnelle que ma mère me racontait. Il y a cependant des spécialistes qui proclament que ces histoires d’autre- fois contribuent d’une façon importante et positive à la croissance intérieure du jeune. Le renommé psychiatre pour enfants, Bruno Bettelheim, est de cette école : «Les histoires sécurisantes d’aujourd’hui ne parlent ni de la mort, ni du vieillissement, ni de l'espoir en une vie éternelle. Le conte de fées, au contraire, met carrément l’enfant en présence de toutes les difficultés fondamentales de l’homme®.» En se nourrissant des contes traditionnels, l'enfant reçoit sous une forme symbolique, dit-il, des suggestions sur la manière de traiter des graves difficultés de la vie et de s’acheminer en sécurité vers la maturité. J'ose croire que Léah s’accorderait avec les propos de ce savant. Ayant été généreusement nourrie de ces contes pendant son enfance et sa jeunesse, elle se plaira plus tard à les répéter à ses enfants et subséquemment à ses petits-enfants. Comme elle était beaucoup à leur écoute et sensible à leurs besoins, elle s’en serait vite aperçue, si ses contes les traumatisaient. Chose certaine, elle savait bien que ses histoires pouvaient servir de leçon de bonne conduite. On le voit clairement dans le récit qui suit. Les Voleurs Une fois de même, c'était un homme et une femme. Ils aviont une petite fille; elle était désobéisseuse. Toujours, elle voulait aller à quelque part, puis ils vouliont pas. Puis elle y allait pareil. Une journée, toujours bien, elle a dit : — Je vais voir ma grand-mère aujourd'hui. Sa mère a dit : — Tu vas pas voir ta grand-mère, c'est trop dangereux. Je te dis : il y a des voleurs dans le bois, puis tu te feras voler. — Ah ! j'ai-ti point peur. : re à parti. Et marche, puis marche et puis elle trouvait qu'il faisait beau. Elle sait :