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la sienne. L'Amérique avait son premier instituteur, un

Français.

Lescarbot eut encore le mérite d'établir dans le Nouveau Monde la première société récréative et littéraire : l'Ordre du Bon Temps. Avocat par état, il négligeait déjà à Paris ses procès pour s’adonner à la littérature et c’est, en curieux, qu'il passa en Acadie apportant avec lui quelques livres. Pendant les jours d'été, il se livre avec ardeur à la culture des champs et à l’étude de la flore du pays : mais, le soir, et pendant les longues journées d'hiver, il note dans son journal les particularités du pays et les incidents survenus dans la colonie. Retiré dans son modeste cabinet de Port- Royal, il prépare son « Histoire de la Nouvelle France » et écrit « Les Muses de la Nouvelle France ». Généreux et charitable, il ne veut pas jouir seul dans sa tour d'ivoire : les colons partageront ses plaisirs intellectuels.

Il fonde donc l'Ordre du Bon Temps, comprenant une quinzaine de notables de la colonie « dont plusieurs possé- daient des talents littéraires » (1). Les réunions périodiques de la société s’ouvraient par un frugal banquet. Chaque membre présidait à son tour, et au président incombait l'obligation non seulement de veiller à l'exécution du pro-

gramme fixé, mais aussi de solder les frais du banquet.

Le repas était suivi de joyeuses et spirituelles conversations ; on y chantait les airs de la vieille patrie ; on y récitait des pièces de vers composées d'ordinaire par Lescarbot lui- même (2). Nombre de sauvages assistaient à ces réunions, s’habituaient aux mœurs des européens et en apprenaient la

() Thibeau, p. 25. (2) Lescarbot. Liv. IV, ch. XVI,

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